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    Aventures équines

     

     

    L'épopée équestre

     

     

    Chapitre 1 : Caramelle et Epice

    Un temps de chiensBonjour tout le monde ! Je m'appelle Caramelle. Je suis une petite ponette shetland d'environ une dizaine d'années et j'ai une fille, Epice, qui a les poils de la même couleur que moi, si ce n'est que les crins qui parent son encolure et sa queue sont semblables à la paille sèche, quand les miens sont plus bruns que le chocolat. Comme mon nom l'indique, je suis d'une jolie teinte de caramel et mes beaux yeux noisette sont plus doux que le miel. Je suis une vraie normande, j'adore l'odeur suave de la boue qui gémit sous mes petits sabots gris et crasseux. J'ai vu passer de nombreux enfants dans mon centre équestre baigné par les pluies vertes de mon charmant pays. Certains sont gentils comme tout, d'autres ne me plaisent pas tellement, mais ceux qui se montrent tendres avec moi reçoivent de ma part une affection maternelle.

    Je dois vous avouer que je n'ai plus vraiment dix ans, aujourd'hui ; en fait, je devais les avoir il y a près de quinze ans, lorsque parmi mes petits cavaliers, j'ai rencontré une jeune humaine qui n'avait que quatre ans. Elle avait exprimé à maintes reprises, dès son plus jeune âge, son envie irrésistible de faire de l'équitation, après que ses parents lui aient offert sa première promenade à cheval. Elle était obnubilée par cette idée et j'eus l'honneur d'être une de ses premières montures, si ce n'est la première, d'ailleurs. Je crois qu'elle m'aimait tout particulièrement et, sous les directives de la monitrice Marie-Pierre, elle me chevaucha bien souvent. A l'époque, je lui paraissais grande, pensez-vous ! Mais je suis toute petite, en réalité, ce qui est d'ailleurs plutôt mignon. Je crois qu'à part ma fille Epice et une jument appelée Caline, alezane et très douce que montait sa mère, sans m'oublier, moi, la petite fille ne se souvint plus, par la suite, des autres poneys dont elle croisa la route à de nombreuses reprises. Je ne me rappelle pas vraiment du nombre de fois où nous fîmes la reprise ensemble, certainement beaucoup puisque je suis celle dont elle se souvient aujourd'hui le mieux. Elle a encore des photographies de moi quelque part dans un vieux livre... Nous affectionnions tout particulièrement les balades : pendant une heure, nous faisions avec mes camarades équidés et leurs jeunes cavaliers, des sorties autour du centre équestre sur de petits chemins sablonneux que je connaissais par coeur.

    Ces temps-là commencent à être éloignés pour moi comme pour cette amie passagère, aussi en gardons-nous peu de souvenirs. Epice m'a dit qu'elle aussi avait longtemps accueilli sur son dos cette même enfant, mais elle en était moins complice, un peu plus indifférente ; la petite fille l'appréciait surtout, outre sa gentillesse et son calme typique des poneys, parce qu'elle était ma fille mais c'était moi qu'elle préférait. D'autant plus qu'un jour, personne ne se rappelle exactement pourquoi, quelque chose effraya les poneys qui trottaient à la queue-leu-leu dans le manège, guidés par la monitrice ; ce devait être la première fois pour ces enfants que Marie-Pierre leur demanda de nous faire galoper. Toujours est-il qu'Epice et deux autres poneys s'emballèrent et firent trois fois le tour du manège avant que, un à un, les trois humains qui les montaient ne tombent, dont cette enfant que j'aimais bien. Je crois qu'après cette première chute qui devait être la seule pendant les nombreuses années à venir pour elle, la petite fille voulut arrêter l'équitation et on eut peur de ne pas la revoir la semaine suivante. Mais sa mère, qui avait bien vu qu'il s'agissait d'un caprice, n'accepta pas immédiatement et nous la ramena le samedi qui survint, puis le suivant, et l'enfant oublia vite sa peur de tomber à nouveau.

    Je crois malheureusement que nous cessâmes vite de nous revoir, pourtant, mais pour une autre raison : le premier déménagement de la famille, qui s'en allait à l'autre bout de la France, dans le Sud. La jeune humaine vint me dire au revoir, certainement au bout d'un an à peine, et je ne la revis plus jamais dans mon centre. Mais je peux vous parler des autres chevaux qu'elle put rencontrer, du moins ceux qu'elle a appréciés comme moi...

     

    Chapitre 2 : Fripouille

     

    Evidemment, la petite fille, qui était âgée de cinq ans et demi, s'inscrivit à un nouveau centre équestre dès que l'emménagement fut fait. Le premier centre ne la séduisit pas car des chiens enfermés aboyaient violemment sur les visiteurs, les poneys étaient préparés non pas par les cavaliers mais par des palefreniers, certains mordaient et les reprises étaient bondées. On aurait dit une usine, je vous laisse imaginer le moral que devaient avoir mes confrères chevaux ! C'est mauvais, ça, ça donne des chevaux agressifs.

    Un temps de chiens

    Le deuxième centre s'avéra bien plus agréable à fréquenter, avec de gentils poneys dont le premier qu'elle monta, Calin, un petit monsieur un peu plus haut que moi, plus fin et tout blanc au museau rose, qui semblait quelque peu faiblard mais n'avait pas peur de la vitesse. La mascotte, en quelque sorte, du club, était un shetland noir dont je ne vous cacherai pas qu'il était adorable, étant donné la petite taille qu'il faisait, plus bas sur pattes que moi ! Il s'appelait Cachou et les débutants le montaient, guidés par leurs parents ou un moniteur, qui les emmenait faire une promenade derrière le centre entre les allées de platanes en terre battue et les champs de vignes bordés de ruisseaux. Mon ancienne cavalière ne le monta pas car elle était déjà trop grande et elle fit surtout la connaissance d'une ponette qui me ressemblait un peu, Princesse la rapide, d'une jolie mère caractérielle appelée Neige et de sa fille Etoile, sans parler du vieux Pépito qui détestait galoper...

    Etrangement, les poneys qui la marquèrent le plus furent ceux qu'elle connut peu : Balou, un peu plus grand et coquin que ses confrères, baie jusqu'au bout des sabots, et une étonnante ponette qui croisa sa route pendant très peu de temps : Fripouille. Toute grise, elle appartenait à un particulier qui l'avait mise là... en fait, je ne sais même pas pourquoi. Peu importe. Ce qui étonna ma cavalière, c'est que les deux poneys furent rapidement toujours fourrés ensemble, comme des amoureux ; Balou défendait Fripouille, cette dernière empêchait les autres demoiselles à sabots de s'approcher de son fiancé... Elle était très drôle, Fripouille, car quand Balou n'était pas là, elle l'appelait et passait le temps en ruant dans tous les sens dans son paddock, si fort que ses sabots arrières frappaient à grand bruit le plafond de son abri. Quel cran, quelle force ! Je suis sûre qu'elle venait tout droit d'un Western. J'imagine bien son propriétaire, un chapeau de cow-boy sur la tête, en train de lancer son lasso sur le troupeau de vaches qu'il poursuit...

    Mais trêve de rêverie, il s'agissait d'un centre bien français qui n'avait rien d'un ranch et Fripouille n'était que rarement montée, par des enfants de l'âge de ma cavalière. Cette dernière eut la chance de la chevaucher, une fois, et je crois qu'elle n'oublie pas ce moment où, placée à la tête du groupe de cavaliers, elle fit faire un tour de galop à la ponette qui en profita pour aller rejoindre à toute vitesse son Balou en lui fonçant sur la croupe. 

    Elle partit quelque temps plus tard, récupérée par son maître qui n'avait plus besoin des services du club.

     

    Chapitre 3: Rio

     

    Un temps de chiens

    Rio n'a pas été photographié. Ce cheval lui ressemble.

     

    Il y avait, au nouveau centre équestre de ma cavalière, des chevaux de toute taille et de tous âges. Une fois, une pouliche naquit après les onze mois de grossesse de Neige et elle fut appelée Star. C'était une canaille, elle ne cessait de s'échapper et de faire des siennes.

    Mais il y avait aussi une autre classe de poneys, des double-poneys, plus grands que les shetlands, presque aussi grands que de petits chevaux. Les petits ne les montaient pas car ils avaient trop de force et de caractère pour eux. La mienne se vit attribuer les plus dociles et les plus petits d'entre eux comme Bijou, Kiwi, Néron... Mais ceux qu'elle rêvait de monter, c'étaient surtout ces quelques grands poneys comme Chips, Kim, Rio, Eliot ou Java. Ils étaient plus rapides, étaient montés par des enfants d'une dizaine d'années jusque parfois quatorze ou quinze ans. Il fallut attendre longtemps pour mon humaine avant de pouvoir se voir attribuer le premier d'entre eux auquel elle eut accès après de nombreuses demandes : Kim. C'est idiot, d'ailleurs, qu'elle en ait parlé autour d'elle pendant la préparation de ce drôle de confrère qui n'avait qu'une passion, celle de mordiller ses rênes. Vous savez ce que sont les bavardages des enfants, ils déforment toujours tout. Mon humaine entendit bientôt dire que Kim était un mauvais poney qui faisait tomber tous ceux qui osaient le monter. C'était faux, bien sûr, il avait simplement le défaut de faire de toutes petites ruades à chaque départ au galop, mais que l'on sentait à peine. Seulement, ma cavalière était déjà intimidée par le fait de se retrouver sur le dos d'un animal plus grand et plus fort que les précédents, aussi elle se laissa impressionner et, bien sûr, elle tomba. Heureusement la chute ne lui fit pas de mal et elle désira plus ardemment remonter sur les double-poneys. 

    La semaine suivante, c'est Rio que lui accorda la monitrice. Ah, Rio... Quel incroyable poney ! C'était un vieil animal de robe sombre aux yeux marron clair, doux mais qui avait magnifiquement conservé sa jeunesse. Alors qu'il approchait de ses vingt ans, il était de ceux qui couraient le plus vite et étaient les plus difficiles à retenir devant les obstacles. Il avait longtemps été inactif dans sa jeunesse et il avait donc gardé toute sa vitalité. Quel amour... J'aurais bien voulu le rencontrer, celui-là. Déjà, il était resté beau gosse, quand-même (eh oui, que croyez-vous, nous sommes comme vous, nous aimons flirter !), il avait de l'expérience et s'avéra d'une gentillesse inégalable. Ma cavalière m'oublia certainement tout de suite en le montant, malgré la selle en cuir glissant et inconfortable qui rendait le galop un peu... difficile. Rio était de ceux qu'elle aimait : il avait la pêche mais ne cherchait jamais à faire tomber ses humains, il demandait des efforts pour être freiné mais jamais ne faisait de rodéo. Il avait les flancs bien plus sensibles que les miens, par exemple. Nous les shetlands, nous pouvons être de vraies têtes de mûles, aussi on a appris aux enfants à nous donner des coups de talon dans les flancs pour nous faire avancer. Ne me regardez pas comme ça, ça ne fait pas mal, sinon il y a longtemps que les enfants seraient par terre. Mais Rio ressemblait plus à un cheval qu'à un poney et il était plus délicat. Un coup de talon le faisait souffrir et de toute façon, il n'en avait pas besoin ! Il savait très bien avancer tout seul. 

    Sur Rio, ma cavalière se sentait vraiment heureuse. Elle avait l'impression de ne faire qu'un avec lui et ses camarades lui disaient parfois qu'ils allaient bien ensemble, tous les deux. Elle prenait toujours du plaisir à être avec lui et petit-à-petit, elle prit l'habitude de lui apporter chaque semaine son lot de bonbons spécial chevaux - un vrai régal, j'adore ces friandises ; c'est tellement bon que des fois, ce sont les cavaliers qui les mangent à notre place. 

    A la fin, Rio appelait dès qu'il voyait arriver mon humaine et celle-ci passait des heures avec lui, assise près de son paddock ou traînant lors de son pansage... Rio était une passion dévorante qui lui occupait réellement l'esprit. C'était beau, tout simplement, et de les voir tous les deux, ça me donne un peu de nostalgie... Souvent, ils se regardaient les yeux dans les yeux, le calme de l'un apaisant l'angoisse de l'autre. Elle faisait part de ses soucis, de ses doutes, de ses joies et lui, il semblait l'écouter, serein, plongeant quelquefois son museau tiède sur l'épaule de sa cavalière...

    C'est dommage que ces deux-là se soient connus si tard. Rio fêtait ses vingt-et-un ans, il lui fallait prendre sa retraite et profiter paisiblement des dernières années qui lui restaient dans un champ bien agréable. Il partit après deux ou trois ans d'amitié touchante et malheureusement, personne n'a de nouvelles de lui... Il paraît seulement qu'il a pris du ventre. 

     

    Chapitre 4 : Quenver

     

    Je crois bien que Quenver est de loin la plus grande passion qu'a eu mon humaine. Oui, moi aussi je pensais que ça avait été le cas avec Rio mais il y a quelque chose de plus fort encore avec Quenver. D'abord, il est arrivé après plusieurs années, puisqu'il a fallu attendre que ma cavalière ait seize ans pour le rencontrer. On fait un sacré saut dans le temps. Entre les deux, ça avait été un peu creux. Le poney qui remplaçait Rio, appelé Noé, faisait tomber tout le monde et puis les autres chevaux étaient certes gentils pour la plupart, mais aucun n'était plus complice avec mon humaine qu'avec les autres. Rio lui manqua longtemps, je le reconnais, et il lui manque toujours d'ailleurs, mais à l'époque c'était douloureux. Elle crut un moment s'attacher à une jument qui ressemblait à Rio, Vanille. Une vraie jument, cette fois, et l'un des premiers vrais chevaux qu'elle monta, d'ailleurs, après le fragile Bambou. Vanille était elle aussi assez âgée et sa robe était brune à taches blanches sur la croupe, c'était assez joli. Elle était douce, affectueuse, câline et calme. Mais il n'y avait pas cette étincelle qui faisait toute la différence, et puis elle partit à son tour pour décéder d'ailleurs quelques années après, pauvre consoeur... 

    Quenver, c'est un poulain qui arriva en 2008 au club, accompagné d'un autre jeune cheval de quatre ans non débourré - c'est-à-dire, non dressé. Quenver n'appartenait pas au centre équestre, en fait, on l'avait placé là pour qu'il soit débourré afin de pouvoir le vendre dès que possible. Seulement, mon humaine ne le savait pas. Quand elle vit arriver Quenver, elle fut curieuse comme à chaque nouvelle arrivée mais resta distante, d'abord parce qu'il était grand et costaud, mais surtout en raison de sa fougue de jeunesse. Il avait débarqué au milieu du printemps et quelques bonnes élèves de galops 6 et 7 commencèrent à le monter. La première, qui fit d'ailleurs tout son débourrage, impressionna beaucoup mon humaine car Quenver galopait à toute allure, s'arrêtait violemment devant les obstacles, bondissait, obéissait peu... Il n'était pas méchant pour un sou mais avait beaucoup d'énergie et n'y connaissait rien. Mais il avait une soif d'apprendre impressionnante. Quand on le brossait, il tournait la tête et observait avec intérêt la brosse qui passait sur son poil. Il avait une réelle envie de bien faire ce qu'on lui demandait et sa maladresse empressée était très drôle. Mais peu de personnes l'approchaient et s'apercevaient de son caractère exceptionnel, pas même ma cavalière d'ailleurs. Elle observait de loin ce cheval impressionnant et se réjouissait de ne pas le monter. 

    Une fois, le cheval que montait mon humaine prit peur et la désarçonna ; Quenver, qui était dans le même cours, crut qu'il s'agissait d'un jeu et l'imita, faisant immédiatement tomber l'élève sur son dos. 

    C'est pourquoi, le jour de la rentrée des vacances d'été, quand mon humaine s'aperçut que le cheval qu'elle montait n'était autre que Quenver, elle eut la peur au ventre. Verte de panique, elle alla pourtant chercher l'animal au paddock, se demandant si elle ne pouvait pas demander à la monitrice de changer sa monture... Mais Quenver s'avéra sage à l'attache, curieux, fouillant dans la mallette de brosses, posant son museau sur le dos de la jeune fille, qui lui curait les sabots. Ce qu'il était - ce qu'il est - beau ! Grand, svelte, musclé, une belle tête, une crinière fine, de longues jambes, des yeux noirs comme deux charbons... Joli prince adolescent... Finalement, mon humaine le monta... et elle ne fut pas déçue. D'abord, son allure, sa manière de se tenir et de se mouvoir lui convenait parfaitement, ils s'accordaient à l'unisson. Et puis, étrangement, on se sentait en confiance sur lui : il n'avait nulle intention de faire tomber, rien en lui n'était méchant ou malicieux. Il était très simple, en fait, très spontané.

    Le débourrage avait tout de même bien avancé pendant l'été et il obéissait mieux aux rênes ; il ne refusait plus de sauter les obstacles, au contraire, il adorait ça. Il pouvait sauter très haut, sur son dos, on se sentait des ailes... Ce qu'il allait vite, c'était incroyable. Il sautait divinement bien mais ce n'était pas facile car il fallait constamment le freiner, tirer fortement sur les rênes tout en serrant les jambes. Le monter pendant une heure, c'était comme monter toute la journée. Epuisant, mais incroyablement agréable. C'était une pure partie de bonheur. 

    Je crois que la monitrice s'aperçut de l'intérêt que porta soudain mon humaine à Quenver, car elle le lui fit monter cinq fois de suite, puis presque aussi souvent tout au long de l'année. Ils étaient toujours fourrés ensemble, ma cavalière venait toujours le voir le plus longtemps possible, entrait dans son paddock, serrait son encolure dans ses bras, l'embrassait, lui donnait des friandises. Elle adorait le monter, elle adorait le défi que cela représentait et le bonheur que cela procurait. Elle venait même dans la semaine simplement pour le brosser, lui qui adorait se rouler dans la boue qui formait alors une croûte épaisse, comme une carapace géante qui lui donnait un air comique. Comment décrire pareil animal, à la fois tout tendre et si drôle dans sa sincérité touchante ? Couché comme les vaches, il était certainement le seul à ne pas prendre peur quand une des monitrices s'approchait de lui en courant et se jetait sur lui en le poussant de toutes ses forces, pour jouer, le faisant tomber les quatre fers en l'air - au sens propre !

    Quand mon humaine approchait, il venait à la porte de son paddock avec empressement et attendait qu'elle vienne le caresser, et lorsqu'elle s'en allait, il longeait les barrières pour la suivre tout en la regardant, l'air de dire : "Attends-moi, attends-moi, où vas-tu ?" Il y avait dans ses yeux une lueur exceptionnellement humaine. Il était si expressif ! C'était tout bonnement incroyable. Sincèrement, ce cheval m'impressionne beaucoup.

    En plus de cela, il faisait des progrès phénoménaux. Chaque semaine il se montrait plus adroit, moins fougueux, plus obéissant. Le monter était de moins en moins un sport de haut niveau. 

    Il remporta des concours de saut d'obstacle et de dressage tant il était fier, élégant, gracieux et rapide. C'était réellement un cheval parfait. Il avait une complicité avec certains humains qui ressemblait à celle qu'ont les chiens et les humains, et ce n'est pas péjoratif. Vraiment, il se détachait des autres chevaux.

    Le seul problème, c'est qu'il n'appartenait pas au centre équestre et que sa maîtresse ne venait jamais le voir ; elle devait avoir des chevaux en grande quantité, celui-ci étant un poulain comme un autre à vendre sous peu. Je ne sais pas qui étaient ses parents, mais certains disent qu'ils devaient être racés. Pourtant, Quenver n'était pas très cher : cinq mille euros, pour un animal de cette trempe, c'est bien peu, et c'est aussi la preuve que sa maîtresse ne le connaissait vraiment pas. Impossible, sinon elle l'aurait vendu bien plus cher.

    Quand mon humaine apprit la mise en vente de Quenver, je ne vous raconte même pas l'état dans lequel elle fut. Elle n'avait pas de chance : tous les chevaux qu'elle aimait s'en allaient bien trop vite et celui-ci, elle l'adorait plus que tous les autres, elle en était folle. Elle ne pouvait pas l'acheter, l'entretenir, le monter tous les jours représentait trop de frais et de temps pour elle, sans compter qu'un an et demi plus tard elle devrait partir faire ses études. Comment faire pour ne pas le voir partir ? Quel gâchis c'était, lui qui s'entendait si bien avec les monitrices et certains cavaliers, il ne pouvait pas partir avec un inconnu qui l'aurait simplement trouvé beau, il avait trop de liens ici !

    L'anxiété et la tristesse de mon humaine occupèrent son esprit pendant plusieurs mois, tandis qu'elle cherchait une solution pour tenter de l'acheter, quitte à en faire l'acquisition avec d'autres cavalières, tant qu'il restait au centre... Plusieurs acquéreurs potentiels vinrent l'essayer et à chaque fois, mon humaine suppliait Quenver de se montrer sous son plus mauvais jour. Je ne sais pas s'il entendit ses prières, en tout cas personne ne l'acheta en l'espace de quatre mois. Pourtant, il y avait des annonces partout. Coup de chance ?

    Alors que les parents de mon humaine commençaient sérieusement à réfléchir à l'idée de l'acheter, tout en sachant que c'était impossible, il arriva que certains chevaux du club partirent à la retraite. Il fallait un animal pour les remplacer, mais Quenver était tout de même cher pour un centre équestre. Cependant, les monitrices décidèrent de casser la tirelire car se séparer de lui serait un crève coeur. Contre toute attente, Quenver devint donc un membre à part entière de la communauté équine du club et le soulagement fut immense pour mon humaine comme pour ses parents. C'était la meilleure solution...

    Les mois passèrent donc, où l'on put profiter pleinement de ce splendide animal qu'un groupe restreint de cavalières montaient. Un deuxième été vint, puis ce fut la rentrée de terminale et son lot de devoirs quotidiens. Disposant de moins de temps, mon humaine dut se résoudre à ne venir qu'une fois par semaine, continuant de monter souvent son cher Quenver. Mais seulement quelques semaines après le début des cours, il arriva un accident qui allait changer quelque peu les choses : dans la grande carrière, qui se trouvait près de la route, les chevaux se plaçaient en plusieurs larges cercles pour pouvoir s'échauffer avant de sauter. Mon humaine s'était mise au fond, près des arbres et de la route, pour effectuer son galop. Mais à côté, sur un autre cercle, un cheval nerveux entamait lui aussi son galop. Soudain, un camion passa trop vite sur la route, sa remorque accrocha une branche d'arbre qui se cassa dans un grand bruit et tomba sur le bitume, de l'autre côté de la barrière. Le cheval nerveux, qui se trouvait tout près de Quenver, partit immédiatement en rodéo. Souhaitant rassurer Quenver, mon humaine lui caressa rapidement l'encolure mais l'animal effrayé imita le premier cheval. Mon humaine n'eut rien le temps de faire : elle fut violemment éjectée, tête la première, le bras gauche tendu pour tenter d'amortir sa chute. Elle ne sentit même pas le bras s'écraser dans le sable tant la chute était violente et tout son poids s'écrasa sur... sa joue. Sa nuque se tordit gravement et pendant une seconde, elle crut qu'elle était morte. Vraiment. Ce n'était pas possible, elle ne pouvait pas être vivante après s'être cassé le cou, elle ne sentait plus son corps, elle ne pouvait plus bouger, elle ne voyait plus rien.... C'était étrange, presque comme une résignation : dans une seconde, elle serait morte et elle n'avait pas le temps de penser pour regretter quoi que ce soit.

    Mais la seconde d'après, elle était toujours vivante, des fourmis dans tout le corps, incapable de respirer normalement. De panique, elle haletait les yeux fermés, à demis consciente, sa nuque la faisant atrocement souffrir. Heureusement que la monitrice s'accroupit près d'elle et la rassura ; elle lui parla doucement, l'aida à calmer sa respiration, à se mettre sur le dos et à plier doucement ses jambes. C'était comme soulever une montagne mais elle y parvenait, c'était déjà ça. Elle n'était pas paralysée, le monde pouvait s'écrouler, elle allait bien, elle avait la vie devant elle...

    Mais tout de même, après s'être rincé le visage - qui, par ailleurs, était sérieusement griffé à sang par le sable -, elle voulut remonter sur Quenver, car il faut toujours remonter à cheval après une chute, sinon, on ne remonte jamais. Elle n'avait pas senti son poignet mais lorsqu'elle fut de nouveau en selle, il la fit tant souffrir qu'elle fut aussitôt obligée d'en descendre, à moitié pliée en deux, le cou raide. Le bilan à l'hôpital fut plus clément qu'elle pensait : éclatement osseux, immobilisation du poignet pendant cinq semaines, et sérieux torticolis à soigner avec une minerve pendant une semaine.

    Après cette chute et une interdiction de monter avant cinq semaines, l'équitation devint un sport plus difficile et angoissant pour elle. Elle reprit les cours lentement, en douceur, sur des chevaux paisibles pour éviter de forcer sur son poignet encore fragile. Elle ne remonta Quenver que plusieurs mois après et malheureusement, sa complicité avec lui s'en trouva diminuée...

    Elle avait appris les dures lois de l'équitation et pu mesurer la dangerosité d'une telle activité. A présent qu'elle se savait loin d'être invincible, elle n'osait plus monter le coeur léger, apprécier la vitesse et la hauteur des sauts. Diminuée, elle finit l'année dans l'angoisse et fut de toute façon forcée d'arrêter l'équitation en raison des études qu'elle faisait ailleurs.

    Aujourd'hui, elle s'aperçoit que ce qui lui plait le plus, c'est la randonnée à cheval. Ce plaisir de se sentir libre, sur des chevaux habitués au grand air, c'est quelque chose d'unique et je le sais bien, moi qui ai fait des dizaines et des dizaines de promenades... Moi aussi, la montagne, les grandes prairies m'attirent. J'aurais bien voulu être ponette de randonnée ! Quant à mon humaine, elle a donc fait de la randonnée l'été qui a suivi et pour l'instant, elle n'est pas remontée mais elle songe à aller faire un tour au centre équestre. Je crois que voir de nouveau Quenver lui rappellera des souvenirs agréables et qui sait ? Peut-être la reconnaîtra-t-il ? 

     

    Quenver a bien été quelquefois pris en photo ou filmé, mais les images sont protégées. Ici, quelques adresses où vous pourrez faire sa connaissance :

    http://www.flickr.com/photos/28899289@N05/2914647490/

    http://www.youtube.com/watch?v=E--R8XTWipU (vidéo)

    http://www.youtube.com/watch?v=g-ERtGarNAU (vidéo)

    En voici bien une mais elle n'appartient pas à mon humaine et ce n'est pas elle qui le monte. On trouve cette photo à cette adressehttp://liiz0u-x.skyrock.com/ :

     

    Un temps de chiens

    Même jeune fille qui le monte, qui n'est pas mon humaine, cette fois sur ce site : http://h0rs3-x-m3.skyrock.com/ :

     

    Un temps de chiens

    Un temps de chiens

    Un temps de chiens

    Pas vrai qu'il est plutôt beau gosse ?

     

     

     

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    Les races préférées de mon humaine

     

    Il y a des chevaux qui font rêver, et ma cavalière a toujours rêvé d'en posséder un ou deux, plus tard, quand elle aura les moyens. C'est un de ses plus grands buts et elle fera tout ce qui est en son pouvoir pour y parvenir. J'ai remarqué qu'elle avait des préférences pour certaines races de chevaux, alors je vous les mets ici (c'est vrai qu'elles sont belles ! Mais la plus belle à mes yeux reste le shetland, non mais !) :

    - L'Irish Cob :

    Alors là, celui-là, il est super. On dirait un énorme poney. Vous ne trouvez pas qu'il a une bonne bouille ? Avec sa longue crinière ondulée et épaisse, l'Irish Cob est le plus majestueux des chevaux dits de trait, et aussi l'un des plus grands. Ces longs poils sont vraiment... Magnifiques ! Et puis l'Irish Cob a surtout un caractère des plus adorables : intelligent, c'est un animal très doux qui peut nouer avec son maître une profonde amitié. Il est montable et, relativement léger pour un cheval de trait, il peut certainement faire de l'obstacle.


     

    Une dernière, pour la route, celle d'un poulain qui est pourtant déjà bien plus grand que moi !

     

    - Le Pur-Sang Arabe (si célèbre et tellement aimé):

     

    Pourquoi est-ce que vous, les humains, vous trouvez toujours au Pur-Sang Arabe une beauté inégalable ? Ca me tue de devoir le dire car je crois en être un peu jalouse et je préfèrerais qu'il n'y ait pas d'explications, mais je crois en avoir quelques-unes. 

    Alors voilà, le Pur-Sang Arabe est un cheval du désert, il est donc très puissant pour pouvoir courir dans le sable, et surtout très endurant. Ses membres sont fins mais musclés, il n'est pas très grand mais court vite à grandes foulées. Savez-vous que cet animal est un peu l'ancêtre de tous les chevaux répartis dans le monde ? C'est dans le désert qu'est né le cheval et le Pur-Sang Arabe est une race très ancienne, mythique en quelque sorte. Il peuple nos récits, nos légendes, il imprègne l'Histoire. Son port de tête unique et sa queue qu'il porte en panache en font un animal gracieux plein de fougue et d'adresse. Ses yeux brillent d'intelligence et d'audace, il est courageux et on ne l'intimide pas facilement. Idéal pour la randonnée, c'est aussi un très bon compagnon de route qui saura s'attacher à son maître et lui rendre sa tendresse.

     

     

     

     

    Je n'ai pas pu résister à en mettre autant, ce sont quand-même des canons de beauté de nos milieux ! Quelle classe, quelle élégance, quelle fierté ! Moi je suis scotchée.

     

    - Enfin, pour l'instant, voici une race en plus qui émerveille mon humaine (et c'est vrai qu'elle n'est pas mal du tout... Je ne savais même pas qu'elle existait !), le Rocky Mountain Horse de robe silver dapple. C'est un cheval très rare en Europe, il est élevé principalement au Canada et nous vient des Appalaches ; rustique, résistant au froid et à la frugalité, ce cheval est un très bon randonneur. Son pied est sûr dans les rochers et son ossature est plutôt fine ; pas grand, il ressemble parfois à un poney mais c'est plutôt un petit cheval ou un cheval de taille moyenne. Son caractère est doux et calme et c'est un compagnon très agréable, surtout pour la randonnée. En plus, il est facile à manier, même pour les enfants, et fait fureur en ce moment dans le monde. C'est une race miraculée, on n'en compte que 7000 aujourd'hui sur le globe. Quelques élevages ont vu le jour en France, pour les éventuels intéressés. C'est vraiment un cheval parfait : il est d'une gentillesse incomparable, est très coopératif et donne l'impression d'avoir de l'expérience même quand il est tout jeune et non dressé. Céty pas chou ! 

     

     

     

     

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    A Ne pas négliger : l'éthologie

     

    On en parle de plus en plus souvent en ce moment, voici que vient l'ère de l'éthologie. Terme étrange pour désigner la science de murmurer à l'oreille des chevaux. J'avoue que ce n'est pas pour me déplaire : débourrer un cheval et lui apprendre la confiance envers l'Homme en douceur, c'est bien quelque chose qui m'attire et je suis certaine que nombre de mes confrères les chevaux sont de mon avis. 

    Murmurer, c'est à la portée de tous ceux qui s'y essaient s'ils prennent le temps de se renseigner. Des fermes équestres proposent désormais des stages pour former à l'éthologie, mais on trouve aussi des cours rapides et gratuits sur Internet. Il s'agit d'adopter les attitudes du cheval et de savoir comment il fonctionne pour mieux vous faire comprendre. Si je trouve de bons documents sur l'éthologie et comment la pratiquer, je les publierai ici ou communiquerai les liens. En attendant, je vous encourage, vous qui avez eu la patience de supporter mes bavardages et mes photographies en tous genres sur mon monde équestre, à vous documenter si cette pratique vous intéresse. La complicité établie entre le cheval et l'humain est certainement incomparable et peut faire des miracles, avec tout type de cheval. Je vous assure, j'ai vu certains de mes confrères être montés sans rênes et guidés simplement aux gestes esquissés que faisait leur cavalier ; une jeune jument qui n'avait plus d'espoir de marcher suite à un accident, a réappris grâce à l'éthologie à se tenir debout et on peut à présent la monter.

    Je vous laisse deviner le trésor que représente cette nouvelle pratique... 

     

    Une adresse pour vous initier un peu plus à l'éthologie http://www.linternaute.com/femmes/famille/cheval/dossier/apprendre-a-murmurer-a-l-oreille-des-chevaux/presentation-du-haras-de-la-cense.shtml

     

     

     

     

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    Les Films

     

    Chers amis, laissez-moi vous parler de ces films qui m'ont plu, et qui nous racontent quelques histoires très liées aux chevaux :

     

    L'Etalon noir


    Dur de trouver une bande annonce quand le film date de 1973... La meilleure vidéo que j'aie trouvée, c'est celle-ci, même si elle n'avance pas à grand-chose.

    Synopsis du début de l'histoire : Un enfant, Alec Ramsay, rentre des Indes avec son père sur un grand paquebot où les riches jouent au poker. Le jeune garçon s'ennuie et erre sur le bateau. Il découvre bientôt un endroit du bâtiment flottant où des gens retiennent péniblement en captivité un étalon noir qui ne cesse de se cabrer et de hennir sauvagement. L'enfant est fasciné, mais on le chasse...

    Quelques heures plus tard, le bateau coule. C'est la panique, Alec est séparé de son père, il tombe à l'eau, se croit perdu... Quand tout à coup, dans les ombres noires des vagues agitées sous la nuit noire, il aperçoit... l'étalon, qui nage comme il peut pour s'en sortir. Alec parvient à rejoindre l'animal auquel il s'accroche...

    Lorsqu'il se réveille, il est seul, sur la plage d'une île totalement déserte. Il survit comme il peut, faible, abandonné... Quand soudain il entend un hennissement. L'étalon, magnifique pur-sang arabe, totalement sauvage, erre lui aussi sur l'île.

    Cette histoire m'a beaucoup plue ; elle commence certes à dater, mais j'ai trouvé cette complicité qui naît tout doucement entre les deux rescapés, et qui va les mener petit à petit à des sommets auxquels ils n'avaient jamais rêvé, très émouvante. J'ai beaucoup moins aimé Le Retour de l'Etalon noir, qui est la suite... Quant à la Légende de l'Etalon noir, je ne l'ai pas vue. Je ne savais même pas que ce troisième film existait jusqu'à aujourd'hui.

    Prince Noir

     


    Ce film est un des plus tristes que j'aie jamais vus. Impossible de trouver une bande annonce pour lui, pourtant il ne s'agit pas de la version des années 70 mais celle des années 90... Je vous préviens, si vous regardez ce film, achetez dix tablettes de chocolat pour vous remonter le moral après, parce que ce film est tout simplement horrible. Vous avez un petit aperçu avec la musique... Prince Noir est un magnifique étalon noir à tache blanche sur le front. Il naît dans un grand ranch, il est aimé par ses maîtres qui le cajolent et le chouchoutent. Toute l'histoire est vue à travers les yeux du cheval lui-même. 

    Le problème, c'est que la mère de ses jeunes maîtres tombe malade. Elle ne peut pas rester dans la région, il faut partir... Et vendre les chevaux. Prince Noir va quitter tout ce qu'il aimait pour être lancé dans la vraie (et triste) vie des chevaux de l'époque...

    Horrible. Rien que d'entendre la musique, ça donne envie de pleurer, pourtant je n'ai pas vu Prince Noir depuis au moins six ans.

     

     

     

     

     


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  • La triste et longue histoire

    des petites perruches

    Petits contes ailés

    Chapitre 1 : Pirouette

    A l'époque, je m'appelais Pirouette. C'étaient mes humains qui m'avaient nommée comme ça ; dans mon univers, on n'a pas vraiment de nom, plutôt une odeur particulière qui nous caractérise et que nous sommes seuls à sentir. 

    Je me souviens à peine de mon arrivée dans ma famille, j'étais si jeune, à peine jeune adulte - à ce qu'il paraît, c'est toujours ce qu'il faut faire : adopter une jeune perruche juste sevrée, plutôt qu'une adulte qui restera distante toute sa vie. C'était mon cas, j'étais presque un bébé. Je crois que j'étais née dans un élevage loin des horribles magasins d'animaux, où la plupart du temps, on est très mal traité. Je ne sais pas comment mes humains eurent la connaissance de mon élevage, en tout cas, un jour, je me retrouvai dans un petit carton noir qui bougeait sans cesse. Il y eut un bruit du tonnerre quand on me plaça dans l'énorme cage à roues motorisée que je ne pouvais qu'entendre ; mais je n'avais pas si peur, finalement, j'étais jeune et vive, très espiègle et bien trop curieuse pour regretter mon ancienne cage.

    Quand le plafond de ma geôle sombre s'entrouvrit, j'aperçus trois visages enfantins qui me dévisageaient avec un grand sourire, mais une voix adulte leur intima de se tenir tranquilles et de me laisser m'accoutumer à ma nouvelle vie. Je ne pris pas beaucoup de temps pour m'échapper de ma prison exiguë, pour déboucher dans une cage plus grande aux barreaux blancs qui formaient un cylindre vertical et se rejoignaient tout en haut en une gracieuse coupole. C'est vrai que ce n'était pas immense, mais je ne m'en formalisai pas, j'étais déjà ravie d'être de nouveau au calme et d'avoir la place d'étirer mes ailes. J'avais des branches de millet qui me chatouillaient le ventre, un appétissant distributeur de graines, un os de seiche bien pratique pour me faire le bec et une fontaine à eau qui me désaltéra rapidement. Que demander de plus ?

    Peut-être un peu d'espace pour voler... C'est vrai que je surpris tout le monde par mon tempérament joueur : très vite, j'oubliai ma timidité et je manifestai déjà mon excitation. Je voletais partout dans ma nouvelle maison, je courais de perchoir en perchoir, et je faisais même de jolies pirouettes espiègles qui me valurent bientôt mon prénom... Les jeunes humaines ne restèrent pas longtemps loin de ma cage : elles s'approchèrent de plus en plus et rirent de mes cris enjoués, entamant avec moi un drôle de dialogue en tentant de m'imiter avec leurs sifflements, ce que je repris joyeusement. C'était très drôle : elles sifflaient une fois, je sifflais une fois ; elles sifflaient deux fois, je sifflais deux fois.

    Ainsi, la complicité s'établit rapidement avec ma famille d'accueil, qui ne tarda plus à ouvrir la porte de ma cage pour que je puisse m'aérer un peu. Par mes plumes vertes - et Dieu sait si j'en ai -, il y en avait un qui ne se sentait pas très à l'aise quand je volais à grand bruit (car les ailes, c'est bruyant !) en rase-motte à travers la grande pièce ! Je passais au-dessus de sa tête à toute vitesse et il m'esquivait toujours d'un air crispé, préférant souvent battre en retraite précipitamment vers des étages où je n'avais pas le droit d'aller ! Ce n'est pas qu'il ne m'aimait pas, cet humain, mais s'il avait pu ouvrir les fenêtres pour que je disparaisse, peut-être l'aurait-il fait, si ce n'est que cela aurait brisé le coeur de certaines. Ce n'est pas que j'aurais voulu m'enfuir pour toujours si on m'avait permis de sortir dans le jardin, mais voilà, nous les perruches, nous avons un sens de l'orientation pitoyable et nous sommes incapables de retrouver notre chemin.. Or, nous venons d'un pays chaud où la nourriture se trouve en abondance ; ici, dans les froids pays d'Europe, nous mourons dans la nature en moins de trois jours. Sans compter que de nombreuses plantes sont toxiques pour nous, et nous ne le savons pas.

    Toujours est-il que le premier jour de ma sortie, je fis mon petit effet dès le début. En effet, les enfants jouaient sur le sol au-dessous de moi, dont une qui feuilletait un livre aux feuilles épaisses recouvertes de jolis dessins. Je ne sais pas vraiment ce qui me prit, sûrement que j'avais envie de jouer avec elle, en tout cas, d'un coup, je m'envolai de la fenêtre fermée sur les barres horizontales de laquelle j'aimais me poser et j'atterris en plein sur le livre. Mes petites pattes griffues ripèrent sur les pages glissantes et j'eus du mal à me maintenir debout. Dans la pièce, tout le monde s'immobilisa et je levai mon regard brillant vers la jeune humaine qui me dévisageait avec émerveillement. Je l'avais vue tourner les pages et j'avais trouvé ça rigolo, alors ni une, ni deux, je m'avançai prudemment vers un bord du livre, j'attrapai un rebord de page et d'un coup, je me mis à reculer laborieusement pour la tourner à mon tour. Je ne compris pas trop pourquoi tout le monde rit dans la pièce, en tout cas je recommençai mon manège jusqu'à ce qu'une grande main enfantine ne vienne me barrer le passage. Elle était posée à plat, paume en l'air, et semblait m'inviter. Je lâchai mon bout de page qui retomba dans un bruissement et je fixai presque sans méfiance l'étrange membre rose. Ca n'avait pas l'air bien dangereux, et puis j'en avais déjà vu quelques-unes, des mains, mon éleveur m'avait déjà manipulée. Il n'y avait rien d'autre à faire que de grimper dessus et que de faire ce que j'adorais exécuter : remonter en crabe le long du bras, m'accrocher au vêtements pour ne pas tomber, avancer pas à pas vers le cou de mon hôte et le lui chatouiller par des petits bisous d'oiseau. Je le fis, et à compter de ce jour, à peine quelque temps après mon arrivée, je fus un peu la mascotte de ma famille. Tous les jours, je pouvais sortir de ma cage, voler dans tous les sens de fenêtre fermée en fenêtre fermée pour me poser sur leurs barres de bois, et puis tester le piano aussi en atterrissant sur les touches dont le son m'intriguait beaucoup. C'était très drôle d'entendre la musique que je produisais, certes plus que brouillon, mais quand-même ! Ma maîtresse avait découpé dans du papier-mousse une fausse perruche un peu grossière et m'attirait avec elle d'un bout à l'autre du clavier, me faisant faire des arpèges et des gammes tremblantes du grave vers l'aigu, de l'aigu vers le grave, ponctuées des cliquetis excités de mes griffes qui ripaient partout où je marchais. De toute façon, j'aimais la musique. Je chantais, je faisais toujours du bruit quand je volais, et puis quand un des adultes jouait du piano, je chantais de plus belle en rythme - s'il vous plaît ! Même l'humain m'aimait bien ; en fait, je le fascinais un peu.

    Bien sûr, j'avais quelques défauts ; j'avais beau être très intelligente et très drôle, je ne savais pas ce que voulait dire le mot "propreté" ; où que j'aille, et même parfois quand je me posais sur la tête de mes humains et que je jouais avec leurs cheveux, il m'arrivait fréquemment de laisser mes crottes salissantes. Quand c'était sur le carrelage, c'était facile à enlever, mais je le faisais bien souvent sur les fenêtres, dans les cheveux, sur le piano qui en souffrait évidemment beaucoup, sur les canapés... A mon humble avis, une volière aurait été plus appropriée, mais je n'aurais pas été aussi complice avec mes humains... Les petites m'aimaient tellement, et puis moi je m'amusais bien avec elles. Quand elles m'appelaient je venais sur leurs mains, dans leur cou, et dès que je voyais ma maîtresse adulte, j'adorais venir me poser sur ses lunettes, face à elle, et glisser ma tête entre le verre et l'oeil pour la frotter gentiment.

    Des fois, je prenais des bains dans de petites coupelles remplies d'eau pas trop fraîche, quand il faisait chaud seulement, car les perruches sont des animaux très fragiles et peuvent facilement attraper froid. Un jour que j'étais trop curieuse, je voulus aller voir ce qu'il y avait au fond d'un long verre à boire ; je tombai la tête la première, le bec dans l'eau, incapable d'en sortir... Heureusement que ma maîtresse était là, elle m'attrapa aussitôt par la queue et me fit sortir illico. J'eus mal ce jour-là, car la queue est fragile, mais avait-on eu le choix ?

    Autre inconvénient à ma compagnie, c'est qu'il fallait changer de fond en comble ma cage toutes les semaines. Le sol en était si sale de plumes et d'excréments que je risquais d'être malade, et les enfants aussi. Laver une cage de perruche est laborieux pour un enfant : il fallait retirer le sol, le vider, l'astiquer, puis astiquer toute la cage, les barreaux, les gamelles... Cela, toutes les semaines. Sans compter ma fontaine à eau qu'il fallait changer et nettoyer tous les deux jours, et ma nourriture qu'il ne fallait pas oublier...

    Mis à part cela, je crois que ma compagnie plaisait beaucoup, et je rattrapais les inconvénients par ma joie et mes câlins. Il ne me manquait plus que la parole. Oh, détrompez-vous, on dit que les perruches peuvent parler comme les perroquets, mais en réalité, c'est une rareté. Il faut s'y prendre très tôt et être très patient, répéter vingt fois par jour le même mot, pour espérer qu'au bout de quelques années la perruche se mette à répéter... Moi je n'avais aucune envie de parler, je chantais et cela me suffisait. Mes cris n'importunaient pas car ils n'étaient jamais agressifs, il ne s'agissait pas de piaillements mais de jolies mélodies qui mettaient des touches d'été dans la maison.

    Et moi, j'étais heureuse. Ma jeune maîtresse m'aimait beaucoup car elle avait attendu depuis huit ans d'avoir un animal de compagnie. D'après ce que j'ai compris, elle désirait par-dessus tout un chat, mais ses parents refusaient et la proposition d'une perruche lui avait semblé un bon marché. Elle était très tendre avec moi et passait beaucoup de temps à mes côtés.

    Mais... la paix ne pouvait pas durer, malheureusement. Je ne restai avec eux que quelques mois, un an peut-être, si peu... Un jour d'été, la famille mangeait sur la terrasse et avait sorti ma cage pour que je puisse profiter du soleil. J'adorais ces moments, je respirais l'air du dehors, j'écoutais les tonalités de mon chant se perdre dans la brise... La seule erreur de mes maîtres fut de mettre dans ma cage quelques feuilles diverses pour décorer mon intérieur. Ils pensaient me faire plaisir... Parmi ces feuilles, je reconnus du lierre. Danger mortel, le lierre, c'est un poison qui ne vous laisse aucune chance. A cette époque je ne savais pas que j'étais condamnée...

    La famille était à quelques jours d'un déménagement. Bientôt, les enfants, dont ma jeune maîtresse, furent envoyées quelque part loin des parents, pour éviter qu'elles ne les gênent au milieu des cartons. Moi je me sentais de plus en plus mal, faible, perdant l'appétit. Toute cette agitation, cette poussière que l'on remuait, ces meubles que l'on déplaçait à grand bruit, ce paysage qui changea d'un coup, ces déménageurs aux visages inconnus qui n'étaient évidemment pas là pour faire dans la délicatesse, contribuèrent à m'épuiser davantage. Le voyage dans la voiture, même si j'étais toujours dans cette cage que je connaissais bien, m'aurait certainement moins traumatisée si je n'avais pas été si faible. Ma maîtresse adulte me jetait des regards fréquents et inquiets, tourmentée par mon aspect maladif, et elle attribuait mon état au déménagement sans savoir que la maladie s'était propagée avant, à cause d'une ignorance qu'on ne pouvait lui reprocher... J'aurais tant voulu m'accrocher, ne pas quitter ainsi cette famille dans laquelle j'étais à mon aise... mais j'étais trop fragile, impuissante. Le lendemain de l'emménagement, je succombai à mon enfer, pâle ombre de ce que j'avais été jusque là... Ma maîtresse me découvrit là et s'en trouva bouleversée. Les enfants arrivaient dans quelques jours et il ne fallait pas qu'ils attribuent à la nouvelle maison la mort de leur petite compagne...

    Désemparée, ne sachant pas quoi faire et triste de ma perte, mon humaine alla m'enterrer au fond du jardin et passa la journée suivante dans les animaleries, à la recherche d'une perruche qui pourrait me ressembler pour tromper les enfants. Ce n'était pas de gaîté de coeur qu'elle faisait cela, au contraire, elle s'en voulait, mais il lui fallait bien préserver ses filles... 

     

    Chapitre 2 : Inimitable Pirouette.

    Après ma mort, la Fausse Pirouette prit ma place dans la cage. Elle me ressemblait assez, physiquement, avec ses plumes vertes, ses joues jaunes et bleues, sa queue chatoyante. Mais c'était une adulte que les mains des humains effrayaient. Ma jeune maîtresse, assaillie par de nombreuses images nouvelles, prêta l'état de cette perruche étrange à ma maladie, sans savoir que j'étais décédée. Sa mère ne lui révéla d'ailleurs l'affaire que de nombreuses années plus tard. 

    Mais tout de même, la santé de cette nouvelle perruche était alarmante. Elle n'était visiblement plus toute jeune et l'empressement des enfants à la caresser, la faire sortir, la faire jouer et chanter, la traumatisait. Elle n'avait rien de commun avec moi, la bécasse !

     

    Petits contes ailés

    Pour lui redonner goût à la vie, mon ancienne maîtresse eut l'idée de lui offrir une petite compagne. Elle emmena donc les enfants dans une animalerie et elles rapportèrent une jolie petite perruche mâle, toute bleue aux joues blanches, qu'on appela vite Grignote. La seule différence avec une femelle, c'était son bec bleu caractéristique des mâles. Grignote, moins farouche que mon usurpatrice, se laissait caresser sur le ventre mais restait plus distant que moi, plus timide. Il lui manquait cette espièglerie, cette naïveté, cette malice que j'avais eues, moi. C'était un gentil mâle, très doux avec sa compagne. Mais la Fausse Pirouette était trop mal en point ; elle s'éteignit au bout de quelques jours sans vraiment que l'on sache pourquoi, et les petites crurent longtemps qu'il s'agissait de ma mort. Elles me pleurèrent longtemps, décontenancées par ce qu'elles pensaient que j'étais devenue pendant ces plusieurs dizaines de jours où je m'étais apparemment faite distante, fermée...

    Elles me regrettèrent tellement que ma maîtresse adulte, désirant apporter aussi un réconfort à Grignote qui se laissait un peu dépérir à présent qu'il était seul, emmena le reste de la famille chercher une autre perruche, qui à ma grande irritation, me ressemblait également bien qu'elle soit plus petite de taille. D'ailleurs, les enfants qui ne voulaient pas accepter mon départ, l'appelèrent... Pirouette2. Vive l'originalité.

    De toute façon, je crois que les perruches destinées à me remplacer furent frappées de malédiction. Cette deuxième fausse Pirouette s'avéra faible également, avec une malformation de la patte qui l'empêchait de se mouvoir correctement. Au bout de seulement quelques jours, on la rapporta à l'animalerie pour éviter un nouveau décès.

     

    Chapitre 3 : Brindille.

     

    Petits contes ailés

    Bien entendu, on ne repartit pas bredouille : Grignote avait besoin de compagnie. Il sortait bien moins souvent que moi à mon époque, ne serait-ce que parce qu'il était incapable de distinguer les vitres des fenêtres (quand moi je les reconnaissais parfaitement) et se cognait violemment dessus. Il fallait, quand il sortait, mettre les volets en tuile pour qu'il croie avoir à faire à un mur. Si ce n'est pas malheureux... Et puis il devenait de plus en plus distant, lui aussi, bien que les enfants l'aiment bien quand-même.

    Ma jeune maîtresse choisit une nouvelle perruche qu'elle appela Brindille. C'était un joli petit oiseau, plus clair que moi, avec les plumes majoritairement jaunes, sauf le ventre qui était d'un vert très clair se rapprochant du jaune. Elle était très jolie et paraissait mignonne comme tout.

    Placée avec Grignote, elle ne sembla pas vraiment l'apprécier, pourtant. Tous deux, sans se détester, restèrent prudemment de leur côté. C'était la débandade quand on les faisait sortir : ils voletaient partout dans un concert de bruits d'ailes qui battent l'air, salissaient évidemment tout, s'en allaient à l'étage, et Brindille se cognait aux vitres même quand les volets étaient à demi fermés. Alors on finit par ne plus les libérer, d'autant plus qu'ils ne s'occupaient absolument pas de leurs maîtres, passant au-dessus d'eux sans jamais se poser ne serait-ce que près d'eux, fuyant dès qu'ils approchaient... Grignote se laissa de moins en moins caresser sur le ventre quand il était dans sa cage, cherchant toujours à échapper aux doigts, surtout que Brindille s'affolait...

    La situation empira encore de semaine en semaine, tandis que Brindille affirmait de plus en plus sa suprêmatie dans la cage. Bientôt, Grignote reçut des coups de becs, se vit chassé des mangeoires. On n'entendait que les piaillements mécontents de Brindille, et Grignote, qui ne chantait déjà que rarement, n'ouvrait plus le bec. Souvent, il fallut aux maîtres séparer les deux oiseaux qui s'attaquaient, ou plutôt arracher Grignote aux griffes acharnées de Brindille.

    La famille avait coutume de partir en vacances en laissant les perruches, leur donnant une ration suffisante de nourriture et d'eau pour qu'elles vivent bien pendant ces quelques jours d'absence. Mais cette fois-là, Brindille put attaquer à sa guise Grignote et l'empêcher de manger comme elle le désirait. Au retour de vacances de mes anciens humains, Grignote fut trouvé mort au fond de la cage. Pauvre ami... Il alla trouver sa place à mes côtés au fond du jardin, où je pus lui tenir compagnie, en quelque sorte.

    Quant à Brindille, elle fut la plus teigneuse de nous toutes. Criant à tue-tête toute la journée, piaillant de mécontentement dès qu'on approchait le piano, elle salissait la maison sans sortir de sa cage, je ne sais même pas pourquoi. Le fait qu'elle ait tué Grignote, qu'elle ne se laisse pas approcher, qu'elle râle toujours après ses maîtres, en fit celle qui fut aussi la moins aimée de toutes. Elle apparut bientôt plus comme une gêne que comme une compagne et vécut plusieurs années aux côtés de mes maîtres.

    Un jour où ma maîtresse devait être en troisième, l'humaine qui était sa mère trouva un acquéreur pour Brindille. Cet homme avait entendu parler des déboires avec la perruche jaune et possédait une énorme volière ; cela ne le gênait pas d'accueillir une petite nouvelle.

    Brindille s'en alla le jour même et ne fut pas remplacée.

    Aujourd'hui, elle vit encore, dans cette volière qui semble mieux lui convenir. Les tombes de Pirouette2 et de Grignote, ainsi que la mienne, furent détruites quelques années plus tard par une pelleteuse qui aplanissait le terrain. Mais je sais que mon souvenir est toujours présent dans les coeurs de ma famille qui, après toutes ces années, continue de penser que j'étais une perruche exceptionnelle. 

     

     

     

     

     

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    Petits contes ailés

     

    Histoires d'oiseaux

    qui croisèrent mon chemin

     

    J'ai eu beaucoup d'aventures avec les oiseaux, et peu qui ont fini bien, malheureusement. Je crois que je ne suis pas vraiment faite pour ces animaux.

    Je ne compte plus les fois où mon premier chat m'a rapporté des moineaux blessés, quand ils n'étaient pas déjà morts. J'ai pu en sauver deux parmi eux. Je me rappelle les avoir arrachés en douceur à la chasseuse, comme beaucoup d'autres, et je les ai mis dans un nid douillet improvisé s'ils étaient vraiment mal en point -vous savez, ces petites maisons pour oiseaux dont on hérite en même temps que les chocolats de Pâques -, ou bien dans la cage de transport de mon chat s'ils allaient déjà mieux, le temps qu'ils se remettent. 

    En vérité, même certains que je mis directement dans la cage de transport moururent dans la nuit. J'avais encore des graines et des millets, je pus les nourrir. Mais voilà, seulement deux purent être relâchés le lendemain matin, impatients de repartir. 

    J'ai aussi le souvenir d'un oiseau malade que j'avais recueilli bien avant d'avoir mon premier chat, pendant que j'avais Grignote je crois. Il faisait très froid ce jour-là et l'oiseau s'était réfugié contre la porte du jardin, tremblant. Dès que je l'ai vu, je l'ai pris, l'ai réchauffé, l'ai nourri... Mais il est décédé lui aussi. On ne peut pas faire grand-chose pour ces animaux, ils sont si petits, on n'a pas les moyens de les soigner, et même les vétérinaires sont souvent impuissants.

    Là où je me sens plus coupable, c'est quand j'ai recueilli un oisillon qui avait déjà ses plumes et apprenait à voler mais ne pouvait que sautiller. C'était là aussi un moineau, et je l'avais recueilli au centre équestre. Il appelait désespérément sa mère et je l'avais trouvé coincé derrière un frigo, empêtré dans les tuyaux. Je pensais qu'il avait perdu sa mère et qu'il allait mourir là, tout seul, alors je l'ai pris, sans savoir que la mère serait très probablement venue le chercher à la tombée de la nuit pour le ramener au nid. Le petit oiseau ne savait pas se nourrir tout seul, je lui ai donc concocté des mélanges pour oisillon - en passant, surtout pas de pain au lait, mais plutôt des croquettes pour chat ramollies, c'était conseillé sur Internet. Mais il n'y avait rien à faire, il ne voulait pas ouvrir le bec. J'ai tout essayé pour qu'il ne se laisse pas dépérir, mais je crois que c'est un réflexe lorsqu'ils sont enfermés et séparés de leur mère, ils se laissent mourir.

    Il est mort deux jours plus tard après mas vains efforts. Je me suis sentie stupide.

     

    J'ai aussi eu des histoires avec des oeufs. La première reste un souvenir amer, chargé de rancoeur et de dégoût pour la cruauté enfantine. C'était dans la cour d'école, j'étais en CE2 et il y avait un arbre qui poussait sur le béton. Un oiseau avait fait son nid hors de portée, jusqu'à ce que des travaux soient faits et qu'une terrasse rendent les branches accessibles. La première réaction des enfants, ça a été de ses saisir des oeufs et de faire une bataille avec. J'ai pu en récupérer un pour tenter de le sauver, dégoûtée. Je l'ai réchauffé comme j'ai pu, suis restée pendant des heures à côté de lui, l'entourant de coton et posant ma main dessus.

    Quand il s'est ouvert, on ne voyait qu'à peine l'embryon. Je n'avais pas pu en sauver un seul du désastre.

     

    J'ai trouvé d'autres oeufs, des oeufs de pigeon cette fois, quelques années plus tard alors qu'ils allaient être donnés à un chien, mais l'expérience n'a pas été plus concluante. Ils ne se sont jamais ouverts, et de toute façon, c'était peine perdue avec cette espèce d'oiseaux, car à la naissance des petits, la mère secrète un mélange qu'elle leur donne et qui leur est indispensable, mais l'Homme n'a jamais réussi à le reproduire. Je crois que je ne toucherai plus jamais aux oeufs, même s'ils sont en danger, car je ne leur suis d'aucune utilité. Pareil pour les oisillons, mon intervention ne les mettrait que plus encore en danger.

    Par-contre, je continuerai d'essayer de sauver les victimes de mon chat, même si l'espoir est minime.

     

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    Je m'aperçois que j'ai honteusement oublié de vous parler d'un oiseau qui m'a profondément marquée quand j'étais toute petite : le rouge-gorge. Un rouge-gorge devait nicher juste à côté de chez nous en Normandie, peut-être dans les tuiles du garage ; en tout cas, il venait nous voir tous les jours et à chaque fois, nous sortions dans la cour où il sautillait joyeusement pour tenter de l'approcher. Nous lui donnions des petits morceaux de pain le matin et le soir et, à croire qu'il avait une horloge dans la tête, il revenait toujours à ces heures-là, même si on pouvait aussi le voir dans la journée. Les rouge-gorges sont des joueurs ; malins, futés, intelligents, ils sont un peu comme les corbeaux ou les pies, ils aiment prendre des risques. L'oiseau s'approchait de nous de manière presque insolente parfois, c'était fascinant, et si au départ il n'avait nulle envie que nous le touchions et s'amusait simplement à s'envoler au dernier moment, je me rappelle que dans les derniers jours avant notre déménagement pour le sud de la France, il a semblé réellement vouloir manger ans nos mains, même si je peux me tromper. Il était presque à portée de main quand mon père a déboulé dans la cour par la porte-fenêtre, faisant fuir le rouge-gorge...

    Pour moi, cet oiseau est resté un des symboles de cette Normandie que j'aime tant. Tout comme le muguet est ma plante favorite, le rouge-gorge, lui, demeurera certainement l'oiseau que je préfère.

    Je n'en ai que peu revu dans le sud de la France. Quelquefois, j'en ai apercu qui picoraient les fruits de la vigne vierge sur ma terrasse, mais ils ne ressemblaient pas à l'oiseau joueur dont je me rappelais, et ils étaient si rares. Pas une fois mes chats ne m'en ont rapporté un. Je me souviens en avoir rencontré un chez mes grands-parents, dans le jardin ; je devais avoir onze ans et il voletait autour de la table où nous mangions, dehors. J'avais à cette époque une chatte très chasseuse, qui nous ramenait presque tous les jours le butin de ses nombreuses chasses. Le rouge-gorge avait un éclat de malice dans les yeux et faisait mine de n'avoir pas remarqué le félin qui s'était déjà placée en position d'attaque. Pire que cela, l'oiseau faisait exprès de venir se poser tout près de la chatte qui en bavait d'envie. Mais à chaque fois qu'elle lui sautait dessus avec de plus en plus de colère, il trouvait le moyen de lui échapper. Il s'envolait toujours à la dernière seconde, lui glissant entre les griffes, et allait se poser pile hors de portée, juste à la limite, sur une branche basse mais trop fragile pour supporter le poids de la chasseuse ou au sommet d'un buisson trop épais pour que la chatte puisse s'y introduire.

    Nous avons bien ri ce jour-là, sauf peut-être la chatte qui n'en menait pas large.

    Chaque fois qu'un rouge-gorge se pose près de ma fenêtre, je ne peux désormais m'empêcher de l'observer avec un sourire, et je sais que du coin de l'oeil, l'effronté me surveille avec un éclat dans le regard qui ressemble à un sourire malicieux...

     

    Un temps de chiens

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     



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  •  Cette partie du blog est en reconstruction ; les informations sont encore présentes mais sous leur ancienne présentation, qui va changer d'ici peu. Merci de votre compréhension !

    Avant-propos

    Chers amis, nous voici dans le chapitre un peu gnan-gnan de ce blog : les histoires des nombreuses bébêtes que j'ai pu croiser dans ma vie sont contées ici. C'est peut-être idiot mais quand j'y pense, j'ai pu en approcher pas mal, finalement... Alors pourquoi ne pas en parler ? J'aime profondément les animaux, leur présence m'est indispensable. Il y a des hommages que l'on a envie de rendre, des souvenirs agréables qui remontent à la surface, alors peu importe que cela puisse avoir un petit côté ridicule =) On peut dire qu'en quelque sorte, ce sont des histoires comme d'autres...

    Si le coeur vous en dit, vous êtes les bienvenus parmi ces nombreux petits contes.

     

     

     

     


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    Chers amis, je vous présente Joséphine, 18 ans, dont l'inspiration semble loin de se tarir. Pour ses seize ans, ses parents lui ont offert le privilège d'être publiée et sa première trilogie est sortie. Je vous laisse découvrir son univers en cliquant sur ce lien : http://editionsdelatribu.eklablog.fr/accueil-c442984 

    Bon voyage !


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    Joséphine Cavène-Pérez et ses nombreux écrits

    Joséphine Cavène-Pérez et ses nombreux écrits

    Joséphine Cavène-Pérez et ses nombreux écrits

     

    Voici les couvertures des trois tomes de la trilogie des Lames d'Argent.

    Pour avoir lu déjà deux tomes sur trois, je peux vous assurer que ces livres-là ne vous laisseront pas de marbre. J'en aperçois déjà certains au fond là (si-si, vous là-bas, à gauche, ne croyez pas que je ne vous ai pas remarqué avec votre air sceptique !) qui se disent "Ca y est, revoilà une histoire de Fantasy bien bateau, avec toute la recette pour le grand public : dragonniers, fées, elfes, guerriers, épées, chevaliers... Tout pour plaire, mais pas vraiment original. A ces élèves non dénués de pertinence (car c'est si commun !), je réponds : FAUX !

    Pas sur ce continent-là, messieurs-dames. Car voyez-vous, ce qui est drôle et intéressant dans ces trois romans, c'est que l'auteure prend un malin plaisir à démonter tout en finesse les nombreux clichés qui affaiblissent les livres d'aujourd'hui. Comment ? En faisant de son héros principal une sorte de looser intéressé, ancien dragonnier pillard - car dans cette histoire, les dragonniers sont des brigands, des pirates de l'air, qui pillent les villes prospères ! - qui en a eu assez de voir tous ses dragons mourir les uns après les autres dans des embuscades ratées. Du coup, il se retrouve coincé dans une taverne miteuse du vieux port de Combelune, capitale d'Orprovince depuis que l'ancienne ville-phare, Moirétoile, est tombée aux mains des brigands, en compagnie de la fée parjure Nephtys, muette comme une taupe et court vêtue, et d'Ygrégor le sorcier du cinquième niveau, tout de noir paré. Pour manger, parce qu'il faut quand-même, ils accomplissent les basses tâches que les plus riches ne peuvent se permettre de faire. 

    Alors quand on vient proposer à Deymos Lame d'argent de rapporter une épée disparue depuis des siècles au Faucon, pour cinq mille couronnes, le dragonnier déchu accepte immédiatement... sans rien savoir de cette certaine Larmoyante. Où se cache-t-elle ? A quoi ressemble-t-elle ? Que de boulot en perspective à travers ce monde à la fois beau et froid, où les Grands manipulent les Petits quand ils ne le font pas entre eux. Heureusement que les autres l'aident plus qu'un peu dans son entreprise ; rejoints par Zembria la magicienne incapable de parvenir au cinquième niveau de sorcellerie, alors qu'elle rêve déjà d'atteindre le septième et dernier niveau, la petite troupe de bras cassés va se retrouver mêlée à des histoires auxquelles elle n'aurait jamais dû être liée. 

    Fuyant le manichéisme, Joséphine Cavène-Pérez nous mêle à sa pléthore de héros aux personnalités délicieusement ambiguës et ne cesse de nous surprendre. Amoureuse de Balzac dont elle a hérité le talent de la description, elle est aussi une fan des grandes Fantasy du XX° siècle, leur ajoutant en prime le sel tout nouveau d'un humour parfois décapant. 

    C'est triste, c'est drôle, ça fait peur, c'est bourré, mais alors bourré à bloc d'action, et les révélations sont si nombreuses et si imprévisibles qu'il n'est pas rare qu'on arrête la lecture cinq minutes, le temps de reprendre son souffle. 

    Sincèrement, je vous recommande ces trois livres qui, après les nombreuses dérives de la Fantasy moderne, réinventent la grande Fantasy du siècle passé, leur redonnant un sacré coup de jeune.

    Alors n'hésitez plus, qu'attendez-vous ? Ils vous attendent sur le site précédemment donné, où un point de vente a été installé : malheureusement, faute de moyens, toutes les librairies ne sont pas desservies.

     

    Tous droits réservés : cette oeuvre est la propriété de Joséphine Cavène-Pérez

    Protégée légalement

     

     

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    Y a du nouveau côté Lames d'Argent !

     

    Voilà que le tome 3 se trouve entre mes mains, sorti tout récemment. Je m'en vais le dévorer et vous en donner quelques nouvelles, sans toutefois révéler quoi que ce soit de l'intrigue pour ceux qui seraient intéressés par les premiers tomes. Vais-je être comblée, déçue ? Surprise ?

    Dès que je le saurai, je vous dirai tout.

    En attendant, j'ai six-cents pages à engloutir alors je vous laisse, y a du boulot ! A très bientôt !

     

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    Ouahh, j'ai toujours pas parlé du tome 3 !! Sanglante est tout simplement génial, voilà. C'est un roman bourré d'action, de révélations, de mystère, et il est bien plus sombre que les deux précédents. Une pointe de mélancolie vient couler sur l'histoire et de nouveaux héros voient le jour ! J'ai adoré ce troisième tome, qui m'a fait me poser beaucoup de questions, car le lecteur est souvent berné par les habitudes de lectures que Joséphine démonte avec des héros que l'on a bien du mal à placer du côté des "gentils" et du côté des "méchants". Y a-t-il vraiment des gens biens, dans cette histoire ? Est-ce que ceux qui sauvent le monde le font réellement pour sauver le monde, et est-ce que ceux qui le détruisent agissent réellement dans ce but... ? Ah ah ! A vous de le découvrir, lecteurs, dans ce troisième tome de la trilogie des Lames d'Argent, qui promet de vous éblouir plus encore que les précédents.

     

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    Kara-djin 

     

    Vous pensiez en avoir fini avec Joséphine Cavène-Pérez ? Eh bien non, elle revient avec une nouvelle saga intitulée Kara-djin. L'histoire ? Sur Kaori, un monde brûlant où dominent les reptiles, deux peuples ancestraux s'affrontent : les Danyals, qui maîtrisent le pouvoir mythique du Vent et vivent dans les Arbres-maisons, et les Oréides, qui maîtrisent le pouvoir du Feu et qui ont réduit les Danyals en exclavage depuis quelques centaines d'années. La résistance danyale s'est organisée, mais un raid des Oréides vient d'anéantir ce qu'il en restait... Seuls trois individus en ont réchappé, et ils tentent, tant bien que mal, de se relever pour sauver leur peuple. Mais comment faire, quand on est trois ? Valna, la seule femme rescapée, porte en elle un enfant, et décide de former un héros qui sauverait les Danyals. Son fils à venir ? Non. Les Danyals ne peuvent rien contre les Oréides. Mais... si ce héros était... un Oréide lui-même ? Elevé par les Danyals ? Et qui maîtriserait autant l'art du Feu et l'art du Sabre, que celui du Vent ?

    Kara-djin promet d'être un livre passionnant. Je suis déjà envoûtée par ce mystérieur Oréide que Valna appellera... Kara-djin, justement.

    Pour lire le début de cette saga, vous pouvez vous rendre sur le site de Joséphine à cette page : http://editionsdelatribu.eklablog.fr/extraits-c489643    N'hésitez pas à vous promener sur le site, des images des personnages ont été postées !

    Kara-djin est en cours de correction et son auteure tentera bientôt de le faire publier.

     

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    Les Malédictions Anonymes

     

     

     

    C'est une très belle surprise que nous a faite Joséphine Cavène-Pérez en publiant sur le site d'écriture De Plume en Plume (lien dans la colonne de droite, rubrique "Liens") les premiers chapitres d'une autre de ses nombreuses sagas, intitulée Les Malédictions Anonymes. Changement total d'ambiance, cette fois encore : nous voilà plongés dans un monde gorgé de poésie, très aérien, où une intrigue complexe de Cour se tisse sur fond d'un royaume unissant plusieurs galaxies. Cela vous semble banal ? Vous connaissez Joséphine, rien de ce qu'elle écrit n'est banal et il n'y a pas de place pour les clichés. Loin de nous réécrire Star Wars, elle nous emmène dans un univers où ce sont les bateaux qui voguent entre les étoiles, où les Léviathans, grands comme des galaxies, nagent dans le vide, et où les personnages ont des noms et des cultures qui rappellent la Grèce antique ou l'Italie de la Renaissance, sans oublier la Germanie... Sauf que ces cultures du passé se mélangent à celle plus futuriste de ces gens qui voyagent entre les galaxies, se font servir par des valseurs, petits robots servants, et ont des cartes numériques projetées dans les airs, sans parler de leur système de communication élaboré. Il y a des mondes à lune rouge sang, à deux soleils, des mondes glacés, brûlants, ou bien recouverts d'un océan sans fin. Les architectures sont à l'ancienne, magnifiques, tout est splendide, on est totalement porté par ce rêve incroyable que nous raconte Joséphine.

    Les Malédictions Anonymes m'ont fascinée, c'est un véritable coup de coeur. L'écriture y est parfaite, raffinée, précise, poétique, il n'y a rien en trop, rien qui manque, tout est d'une justesse incroyable, et les personnages sont tout de suite attachants.Egide, Alexandre, Héraclide, Antonos... Rejoignez leur aventure en vous rendant à cette adresse, où Joséphine a déjà publié trois chapitres : http://www.de-plume-en-plume.fr/histoire/les-maledictions-anonymes-aa-cantate

    Sincèrement, allez-y, c'est juste sublime ! 


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