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Néant
C'était une rue mourante qui venait s'essouffler sous les doigts paisibles de la mer. La chaleur lunaire des rayons hivernaux piquetait l'étendue chaste d'étoiles dansantes, petites flammes mouillées que la fine dentelle de brume rendait laiteuses et diffuses. On ne distinguait pas les serpents d'eau argentés des raies lumineuses qui ondulaient comme de jeunes Indiennes, et les éclairs poissonneux, petites broches merveilleuses, laissaient deviner aux songeurs matinaux d'antiques palais cristallins. Sous les pieds de l'enfant, un trésor sablonneux répandait ses paillettes d'or après avoir été concassé par les gouffres des mauvais jours. Une hamadryade océanique avait répandu quelques coques nervurées entre les galets gris, persuadée sans doute que le monde aimait encore les bijoux bruts et nacrés. La cloche du village sonna trois coups puis s'enraya. L'oiseau d'écume qui s'envolait crut qu'il battait un air devenu vide et se sentit immortel ; il poursuivit un chemin nouveau, sans barrière ni contraintes, sans questionnements incessants ni faibles pensées – ; juste l'Absolu, les grandes goulées, le Pleins poumons. Un sylphe tisserand lui prit ses plumes trop pesantes et les offrit aux fonds ondins. Elles traversèrent la porte de verre, coupèrent à demi la chair turquoise, déclenchèrent les parades journalières des bancs lumineux. Le sang sculpté des coraux accueillit leurs blanches caresses – ; une seule, plus lourde que les autres, fut attirée par le chant des bas-fonds. Elle ne voulut pas des luths littoraux ; elle divagua pendant quelques nonheures, attendant le retour du Maître temps. Quand le clocher villageois dilua de nouveau son appel, elle laissa venir à elle la main de la pesanteur qui l'emmena vers les palais de cristaux marins.
***
Ô grande proue de mon navire !
Tu avais épousé la mer
Et je t'ai laissé hier
Languir.
J'ai vu
La caresse
De l'eau ma bru
Le long de tes tresses
De bois. Tu as glissé sans bruit
Et l'on a entendu chanter l'écume amoureuse
En un formidable concert de plouf et de smash attendris.
La nuit a répandu ses chandelles et j'ai vu ses mille voûtes orgueilleuses
Dresser en chapiteau la cathédrale où vaisseaux et marées
Déployant le pavillon des alliances nouvelles,
Décidèrent à nouveau de se marier
Car la vague est demoiselle
Toujours.
Ô
Navire,
Tu as trop bombé
le torse. Ta large poitrine
de forêt morte a si bien enflé
Que cette nuit tu as brisé
le clocher –
le clocher !
de la ville cristalline.
Les bulles sonores ne seront plus,
et les sylvestres aquatiques boivent à la coupe
Le poison qui les tuera, glorieux satyre des eaux et des airs, telles les reines vaincues d'Egypte.
Tous droits réservés.
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L'auteur
Je m'appelle Amarylle et je suis une Grand-Mohvä de poème. J'avais envie d'exprimer ma sensibilité, héritée du poème duquel je suis née, au travers d'une oeuvre qui vînt de moi.
Aimant le temps qui s'allonge, le calme apaisant, la douceur de la lumière et la caresse de l'air sur mes joues, je suis assez secrète et je préfère la solitude à la compagnie. On m'a demandé de me présenter mais à vrai dire, je n'aime pas beaucoup cela. Aussi, acceptez que je me retire, j'ai à méditer à présent.
J'espère que vous avez apprécié mon poème, bien qu'il soit certainement très imparfait... Après tout je ne suis pas humaine, je n'ai pas votre talent.
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